07/09/2013

TEXTE. Jackson et moi

J‘ai diné, hier soir, avec mon ami Jackson (photographié et publié sur ce blog le 12/07/2013), que je considère comme un brillant artiste.
Nous avons parlé, entre autres choses, des identités hybrides qui font de nous des Noirs pour les uns et des Blancs pour les autres.
Une double appartenance franco haïtienne peut offrir une perspective privilégiée sur l’absurdité de la notion même de race.
J’ai le plus grand respect pour les luttes, toujours actuelles, qui ont mené les peuples d’Afrique et leurs diasporas à se libérer des stigmates du colonialisme.
Mais peut-être est-il temps, tout simplement, de renoncer à être Noir, ou Blanc. De ne plus jouer le jeu pervers des théoriciens racistes qui ont créé ces catégories à leur avantage.
Peut-être pourrait-on tenter de voir au delà, de dépasser ce stade rétrograde.
Jackson et moi appartenons à un groupe d’individus, toujours plus nombreux, pour qui le concept de couleur est vide de sens. Nous rions, parfois, du paradoxe qui nous transforme, selon le point de vue des uns ou des autres, en migrants haïtiens dépositaires d’un obscur atavisme vaudou, ou en prospères et arrogants étrangers français.
Dans tous les cas, nous savons porter un masque. Un de ceux que nous attribuent des conditionnements culturels dont nous réfutons la validité.
C’est sans doute ce qui nous pousse à nous exprimer avec cette rage d’être nous-mêmes, coûte que coûte, sans accorder le moindre crédit à toutes règles instaurées dans le but de séparer et hiérarchiser les hommes.
La musique de Jackson tire sa densité poétique d’un alliage spontané des chants vaudous qu’il entendait, enfant, de son village haïtien, et d'un son rugueux inspiré de sa passion pour les Doors et Jimmy Hendricks.
J’aime utiliser la photographie avec une liberté similaire, explorant les territoires non balisés où me conduit mon instinct, avec pour seul cadre l'expérience du vivant.
Nous partageons une même fréquence vibratoire et un même engouement pour la puissance expressive des oeuvres surgies sans concession des profondeurs de l'âme.

HR

Autoportrait non publié extrait d'une collaboration avec Kathy Le Sant, en 2012