19/05/2015

TEXTE: Exilé

L'identité serait toujours, pour lui, un encombrant fardeau. 
Fidélité aux ancêtres ensevelis dans la terre d'origine. Viscérale affection pour ses vieux géniteurs. Réelle reconnaissance pour l'hospitalité, même relative, du pays qui l'avait accueilli, ou volonté farouche de rompre toute attache, d'assembler le puzzle de son Moi schizophrène.
Le trouble pour horizon, l'incertitude d'un permanent brouillard d'égo. C'était le prix élevé à payer pour l'exil.  N'appartenant à nulle part, instable, d'un bord à l'autre, usé par les tempêtes, il naviguait à vue. 
Mais il aimait sa condition. Et se sentait beaucoup plus libre que ses hôtes. Aucune frontière ne le bornait. Nul ne pouvait cerner sa personnalité. Car son pays était le monde. Il se savait partout un étrange familier, toujours chez lui chez l'autre, jamais bridé par le piège contraignant du sentiment d'appartenance. 
Il était un alien vagabond, l'archétype de l'humain d'un avenir inévitable. Celui qui comprendrait que rien, en vérité, ne séparait les hommes, qu'il ne serait jamais qu'un  lumineux fragment de l'infinie totalité.
HR